Pou une véritable culture industrielle en Mauritanie

Le développement économique et social d’un pays repose essentiellement sur l’industrie et les infrastructures. En Mauritanie, cette dynamique aurait pu être enclenchée dès la nationalisation de la Miferma, le 28 novembre 1974. Malheureusement, cette opportunité historique n’a pas été saisie pour impulser un véritable processus d’industrialisation.

La Société Nationale Industrielle et Minière (SNIM), héritière directe de la Miferma et première entreprise industrielle du pays, aurait dû jouer un rôle moteur dans cette transformation. Ses dirigeants de l’époque, au lieu d’initier la création d’un tissu d’entreprises nationales spécialisées dans la sous-traitance industrielle, se sont contentés de reproduire fidèlement le modèle de gestion hérité de la Miferma — une posture qui perdure encore aujourd’hui.

Cette approche pouvait se comprendre dans les premières années, lorsque le pays manquait de compétences techniques et d’encadrement national qualifié. Mais les différents gouvernements successifs auraient dû imposer à la SNIM de céder progressivement une part de sa sous-traitance à des entreprises mauritaniennes. Cela aurait pu s’accompagner de la création de centres de formation technique modernes, au lieu de laisser péricliter les structures existantes héritées de la Miferma, comme le Centre de Formation de Nouadhibou (CAFM) ou l’École des Métiers de la SOMELEC.

Si de telles entreprises nationales spécialisées dans la maintenance industrielle avaient été mises en place, la Mauritanie serait aujourd’hui mieux préparée à participer activement à la sous-traitance des grands projets énergétiques, comme c’est le cas pour les entreprises sénégalaises dans le projet gazier GTA.

La SNIM, en tant que pilier de l’économie nationale, a un devoir de leadership dans le développement du tissu industriel du pays. Ce rôle passe aussi par la valorisation du capital humain qu’elle a contribué à former. Ces dernières années, de nombreux ingénieurs, directeurs et chefs de services expérimentés ont quitté la société à la retraite. Ils constituent une richesse en savoir-faire accumulé, qui devrait être mise à profit au service du développement national.

L’exemple du projet des Guelbs est révélateur. Ce projet stratégique a été étudié par la société Socomine, créée par d’anciens cadres de la Miferma : MM. Nicolas, Coursin, Demestre et Bastide. C’est cette équipe qui a conçu et participé à la construction de l’usine du Guelb I. Or, la Direction du Développement de la SNIM de l’époque n’a pas jugé utile d’associer des entreprises techniques mauritaniennes à ce projet structurant, privant ainsi le pays d’un transfert de compétences pourtant indispensable.

Aujourd’hui, il est plus que temps de corriger cette trajectoire. La création d’une véritable culture industrielle en Mauritanie est une nécessité stratégique. Elle passe par la valorisation de l’expertise nationale, la relance de la formation technique, et l’émergence d’un écosystème industriel local capable de soutenir les grandes entreprises nationales et de participer activement aux grands projets du pays.

 

Selama Mahmoud 

sam, 10/05/2025 - 22:06