Mali : le président Keïta et le Premier ministre Cissé arrêtés

Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta et son Premier ministre, Boubou Cissé, ont été "arrêtés" mardi en fin d’après-midi à Bamako par des militaires en révolte, a affirmé l'un des chefs de la mutinerie.

"Ils sont en route pour Kati"

"Nous pouvons vous dire que le président et le Premier ministres sont sous notre contrôle. Nous les avons arrêtés chez lui" (au domicile du chef de l’État), a déclaré ce militaire ayant requis l’anonymat. "IBK (le président Keïta) et son Premier ministre sont dans un blindé en route pour Kati", le camp militaire de la banlieue de Bamako où la mutinerie a débuté dans la matinée, a affirmé une autre source militaire dans le camp des mutins.

Dans Bamako, ils ont été acclamés par des manifestants rassemblés pour réclamer le départ du chef de l’État aux abord de la place de l’Indépendance, épicentre de la contestation qui ébranle le Mali depuis plusieurs mois, avant de se diriger vers la résidence du président Keïta.

L'Élysée a fait savoir que le président Macron venait de s'entretenir avec les présidents des pays voisins et que la France soutient la médiation de la Cedeao, la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest. Il s'est notamment entretenu avec ses homologues nigérien Mahamadou Issoufou, ivoirien Alassane Ouattara et sénégalais Macky Sall.

Le chef de l’État "suit attentivement la situation et condamne la tentative de mutinerie en cours", a souligné la présidence. Emmanuel Macron a exprimé "son plein soutien aux efforts de médiation en cours de la Cedeao".

Cette dernière, médiatrice au Mali, a dit dans un communiqué suivre "avec une grande préoccupation" la situation, "avec une mutinerie déclenchée dans un contexte sociopolitique déjà très complexe".

Contestation sans précédent depuis deux mois

Les mutins avaient annoncé plus tôt la prise de contrôle d’une garnison proche de Bamako, suscitant l’inquiétude de Washington et des voisins du Mali quant à un éventuel renversement du président Ibrahim Boubacar Keïta, déjà confronté depuis deux mois à une contestation sans précédent depuis le coup d’État de 2012.

L’organisation régionale appelle "les militaires à regagner sans délai leurs casernes" et "rappelle sa ferme opposition à tout changement politique anticonstitutionnel", invitant les "militaires à demeurer dans une posture républicaine".

La communauté des États d’Afrique de l’Ouest "condamne vigoureusement la tentative en cours et prendra toutes les mesures et actions nécessaires à la restauration de l’ordre constitutionnel".

Inquiets également, les États-Unis ont souligné, par la voix de leur émissaire pour le Sahel, Peter Pham, qu’ils "s’opposent" à tout changement de gouvernement en dehors du cadre légal, "que ce soit par ceux qui sont dans la rue ou par les forces de défense et de sécurité".

Situation confuse

En milieu d’après-midi, la situation restait confuse dans la capitale malienne et dans sa banlieue. Une chose est sûre : des militaires ont pris le contrôle dans la matinée du camp Soundiata Keïta, situé à Kati, à une quinzaine de kilomètres de Bamako.

"Des militaires en colère ont pris les armes au camp de Kati et ont tiré en l’air. Ils étaient nombreux et très nerveux", a expliqué un médecin de l’hôpital de la ville.

Situation "volatile"

Les raisons de ce coup de colère n’étaient pas immédiatement claires. Ces militaires ont ensuite bouclé les accès de la garnison.

Un militaire faisant partie de ceux ayant pris le contrôle du camp a affirmé qu’ils détenaient "plusieurs hauts gradés de l’armée, arrêtés par les frondeurs". 

Peu avant son arrestation par les militaires, le Premier ministre Boubou Cissé avait demandé aux mutins de "faire taire les armes", se disant prêt à engager avec eux un "dialogue fraternel afin de lever tous les malentendus".

"Les mouvements d’humeur constatés traduisent une certaine frustration qui peut avoir des causes légitimes", avait estimé le chef du gouvernement, sans plus de détails sur les raisons de la colère des militaires.

Plusieurs chancelleries occidentales ont fait état de l’arrestation de personnalités politiques, dont des ministres, mais elles n’ont pas pu être confirmées de source officielles, pas plus que celles concernant les hauts gradés.

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mar, 18/08/2020 - 18:42