ETUDE DE CAS : Ould Abdel Aziz.  « Rajil mouzaabi ?

Quoique que nous puissions dire de mauvais et de  méchant de Ould Abdel Aziz, nous tous, que nous soyons  journalistes, politiciens ou simples citoyens, cet  homme restera, celui qui, à lui tout seul, a fait plus  que tous les présidents qui se sont succédés depuis notre indépendance.

Ni la haine de chacun d’entre nous envers cet homme, ni nos très bonnes vieilles habitudes de tourner le dos à ceux qui sont affaiblis par des circonstances exceptionnelles, ni notre désir de prendre position confortable aux côtés de Ghazouani très puissant actuellement et peut être encore pour sept ans, ne doivent nous pousser à une extrême ingratitude  pour  refuser d’admettre pour   la postérité que Ould Abdel Aziz est tout un pan de notre histoire.

Celui qui, 11 ans durant, s’est faufilé militairement puis politiquement pour « rouler dans la farine » les généraux, les politiciens, les partenaires, les organisations internationales, la société civile, a bien  inscrit son nom en gras et par encre indélébile sur la page de l’histoire de notre pays.

Véritable bulldozer, cet homme avait fait  de la Mauritanie un pays, véritable chantier où s’activaient sans relâche,  par  une course contre la montre et pour enrichissement illicite, tous les acteurs et les metteurs en scène de l’effondrement de notre économie.

Quoiqu’il en soit, et quel que soit ce qu’on peut reprocher aujourd’hui  à cet accusé de « tout » ce dont il est lui-même coupable,  mais aussi de tout ce dont les véritables coupables pas inquiétés  sont parmi nous en liberté, Ould Abdel Aziz  reste tout de même un ancien chef de l’Etat.

C’est pourquoi, à  mon avis ce que l’on constate depuis quelques  jours sur les conditions de détentions extrêmes de l’ancien chef de l’Etat  ne s’explique pas vraiment. Mais surtout ne se justifie pas, ne sert à rien et ne contribue d’aucune manière à instaurer  un climat de paix et de sérénité dans le pays en ce moment  confronté à des multiples problèmes qui exigent du régime que les préoccupations se focalisent sur l’essentiel.

Ould Abdel Aziz, empêtré par lui-même dans une situation difficile.

Il est vrai que la justice ne fait que son travail. Même si ce travail donne l’impression d’être mené  loin de la satisfaction  de Ould Abdel Aziz et  de ses avocats  qui savent bien mais ne le disent pas,   que leur client ne leur rend  pas la tâche facilite. Qu’au contraire,  il rend cette tâche très difficile et très compliquée en refusant de coopérer avec la justice au moins en répondant  à des questions qu’on lui pose qui le citent comme témoin.

Partant de ce constat, on peut dès lors conclure, que Ould Abdel Aziz a qui,  au début  de sa  détention des largesses  avaient été accordées,  notamment  sous  statut d’inculpé  en résidence surveillée dans son propre domicile, s’est empêtré volontairement dans les difficultés qui empoisonnent actuellement sa vie, celle de sa  famille, celle de ses proches en jouant dans la rue à l’opposant de l’injustice de l’Etat.

S’il se « débat » maintenant pour trouver une sortie « négociée » de  cette détention  très rigoureuse et très contraignante pour ses avocats comme pour les membres de sa famille, il doit en principe, et en toute honnêteté  accepter de reconnaitre que tout le calvaire qu’il vit en ce moment est la conséquence de ses actes.

Quand Ould Abdel Aziz, se jette volontairement dans la gueule du loup.

Qu’il le veuille ou pas, qu’il le reconnaisse ou pas , Ould Abdel Aziz s’est jeté consciemment dans une  gueule du loup en piétinant  les textes de lois de son pays, en semant la zizanie dans la vie politique de la nation et en jouant au trouble-fête  par des sorties répétées maladroites et provocantes devant les  presses dans un seul but,  celui d’empoisonner l’atmosphère par des déclarations qui pèsent maintenant d’un poids  très lourd dans les mesures extrêmes  prises dans le cadre de sa  détention préventive.

En contournant les règles de procédures lors de ses déplacements pour aller émarger à la police des crimes économiques et financiers alors qu’à l’époque  il était en résidence surveillée chez lui, puis  plus tard,  en se procurant un moyen de communication de manière illégale pour communiquer  en cachette avec la presse étrangère depuis sa cellule, et,  tout récemment en « tweetant » par un moyen prohibé, l’ancien président,  qui n’est  plus au vu de la loi qu’un prévenu en détention préventive, a compliqué sa situation en  donnant à la justice qui ne veut plus lui faire de cadeau,  des raisons justifiées de renforcer les mesures de sécurité et de contrôle à l’intérieur de sa prison de 4 étoiles qui s’est transformée pour lui en enfer.

Les toutes dernières mesures prises à l’encontre du prévenu, un accusé qui pèse plus de 29,356 milliards d’ouguiyas  déjà saisis et  déposés à la  Caisse de Développement sont extrêmes. Elles rappellent à tous  points de vue les conditions de détention dans le quartier de Haute Sécurité de Katingal construit  en 1975 à l’intérieur du Centre Correctionnel « Long Bay Correctional Center » de Sidney en Australie. Ce centre de  type « Supermax » appelé par les prisonniers le « Zoo électronique » était,  avant sa fermeture en 2006, le centre de détention  et de correction le plus draconien du monde.

Pour la petite histoire, ce centre était destiné à isoler de manière « sensorielle » les détenus considérés très dangereux. Ses portes étaient  contrôlées électroniquement,  il  était truffé  des caméras de surveillance, et ses  cellules  n’étaient pas pourvues de fenêtres.

Si au départ,  (par ironie du sort), la prison de Ould Abdel Aziz avait été conçue et bien équipée par Ould Abdel  Aziz lui-même pour « amadouer » Senoussi,  le disque dur des renseignements    libyens  en vue de lui « soutirer » des sous avant de soutirer des  sous  à son pays, cette prison haut de gamme a été réhabilitée  par Ghazouani pour donner une correction extrêmement sévère  à (Aziz) celui qui avait, -d’après des rumeurs jusqu’ici non confirmées officiellement-,  ordonné de ramener  l’actuel président d’Akjoujt dans un cercueil.

Un courrier adressé à Ghazouani. Ni lettre, ni questions. Demande de libérté ?

Maintenant, est ce qu’il ne faut peut-être pas, au vu de deux lettres, l’une adressée par les quatre  sœurs de Ould Abdel Aziz au CICR,  et l’autre adressée par  Ould Abdel Aziz lui-même  à l’actuel président,  (son ancien ami,  son successeur et maintenant son  ennemi juré),  déduire que les hostilités entre les deux généraux à la retraite n’est pas en train de finir comme la bataille de  Borodino  du 26 août 1812 en Russie où chacun  (Koutousov et Napoléon) pensait qu’il avait remporté la partie ?

L’armistice viendrait elle de ce que Ould Abdel Aziz,   pour ne pas dire «une lettre » a appelé des questions posées à Ould Ghazouani ? Dans ce document  très étalé sur la toile,  le « détenu préventivement » mis en accusation, Ould Abdel Aziz, loin de lui l’idée de se « barricader » derrière l’article 93 (son cheval de bataille avant la mise en place des caméras de surveillance), n’exprime pas  d’apitoiement, et ne veut pas apparaitre comme le misérable résigné devant l’injustice,  la fourberie et l’hypocrisie. Mais, l’ancien président nostalgique de  la lumière du jour, nous renvoie à ce qu’l n’a cessé de répéter.  « Qu’il est riche et même très riche, mais qu’il met en défi quiconque, de prouver qu’il a pris une ouguiya des caisses du trésor ou un dollar des caveaux de la Banque Centrale ». donc innocent par rapport aux détournement de deniers publics.

Ce qui est vrai. Puisque sur tous les lieux des crimes commis par effractions pour s’accaparer de l’argent du pays, nulle  part les enquêteurs n’ont trouvés  les empreintes de  Mohamed Ould Abdel Aziz,  présumé coupable et aujourd’hui en détention préventive sous haute sécurité.

Mais, paradoxalement,  semble-t-il,  ces enquêteurs ont,   trouvé partout sur les lieux de ces crimes les ADN de celui qui n’avait jamais été présent sur les  lieux.

Dans sa lettre, l’ancien président était revenu sur  la question qu’avaient posée « par procuration » trois  dirigeants de l’opposition reçus par Ghazouani, qui s’interrogeaient sur les origines de sa fortune, le nouveau président Ghazouani avait dit que la fortune de Ould Abdel Aziz ne provenait pas du trésor public,

 Mais pour la troisième fois, l’ancien président et   une fois a encore a  dit que l’actuel président est le seul et l’une des rares  personnes à savoir l’origine et la traçabilité de ses biens.

Ultime recours à la clémence ? Menaces à peine « voilées » ou chantage prémédité en échange d’une liberté « demandée » à un président que Ould Abdel Aziz conseille de  ne pas « être le témoin passif d’une injustice et d’un complot grotesque » ?

Que veut insinuer le prévenu quand il affirme que  ses écrits ne représentent que 1% des preuves disponibles irréfutables et factuelles de son innocence ? Qu’il cherche peut être à négocier sa  liberté en échange des  99 % des preuves irréfutables de son innocence qu’il garde comme dernières cartouches ? Ou tout simplement qu’ il demande la clémence de son ancien « ami et frère » pour jouer l’arbitre entre lui  (Aziz) et un juge qui ne veut pas « restituer ce qu’il pense,  sa compréhension de la loi, en disant le droit sans chercher à plaire, à suivre, ou à s’attendre à l’approbation, ou à la réprobation » ?

            En plus qu’il est devenu détenu de Quartier de Haute Sécurité, Aziz est devenu énigmatique. Tant mieux si cela peut aboutir à sa mise en liberté provisoire refusée quatre fois de suite déjà.         A sa place si la cinquième demande de liberté sera la bonne,  de ma cellule,  j’irais directement demander pardon à la famille du défunt Sidi Ould Cheikh Abdallahi  et ensuite je m’inviterais à un thé  chez Ould Bouamatou pour un repentir.

            La situation dans  laquelle se débat Ould Abdel Aziz, ce n’est pas plus et pas moins que du « Tazaabout ». Même un procès équitable n’éteint pas l’action de « Tazaabout ». C’est une malédiction qui ne vient jamais seule et qui ne part pas d’elle-même.

Mohamed chighali

Journaliste indépendant.

ven, 10/12/2021 - 20:03