Ces derniers mois, nous avons assisté à des coups d'État très près de chez nous. Au Mali, au Tchad, en Guinée, et au Burkina Faso. Ces pays très instables comptent parmi les plus pauvres du continent. Certains d’entre eux étaient en faillite de légitimité parce que simplement leurs gouvernements étaient corrompus.
Ces quatre pays ont tous pour dénominateur commun des crises économiques accentuées par le mécontentement des populations livrées à elles-mêmes ou exposées, soit au terrorisme soit au crime organisé.
Les renversements des régimes démocratiques dans certains d'Afrique, (pays de l’Afrique de l'Ouest notamment) deviennent de plus en plus fréquents et sont même quelques fois « légitimés » par des populations qui dénoncent ainsi l’incapacité de leurs dirigeants à répondre à leurs attentes.
La logique et le bon sens des citoyens considèrent maintenant qu’un État perd sa légitimité lorsque son gouvernement se trouve dans l’incapacité de servir son peuple et surtout lorsque ce gouvernement met en avant ses propres intérêts et ceux de ses membres qui sont généralement issus des groupes traditionnels de soutiens indispensables pour les partis politiques majoritaires dans ces pays.
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Des coups d’état acceptables et des coups d’état tolérables.
Depuis le coup d'État du 13 janvier 1963 mené par les vétérans togolais de l'armée française avec à leur tête Gnassingbé Eyadema, coup d’état qui avait entrainé la mort de Sylvanus Olympio, beaucoup de changements de régimes ont eus lieu en Afrique.
Ce n’est pas démocratique de le dire évidemment, mais en définitive, maintenant suite au tout dernier coup d’état au Burkina Faso du 24 janvier 2022, (le 8 ème survenu au pays depuis son indépendance), on peut arriver à la conclusion qu’il y’a des coups d’état bons et d’autres mauvais. Ou en tous cas, on peut dire –au constat des faits-, qu’il y’a des coups d’états qui sont plus d’intérêts pour le peuple que le maintien d’un pouvoir légitime.
Les raisons des coups d’état sont multiples. Il y’a des coups d’état qui sont le « fruit » de petits arrangements et de petites manigances entre militaires de pays africains et ceux des gouvernements étrangers, souvent des anciens colonisateurs. Comme c’était le cas pour le Zaïre. Le 24 novembre 1965, quand les belges perturbés par la puissance révolutionnaire de Patrice Lumumba se sont débarrassés de Joseph Kasa Vubu pour pouvoir éliminer le symbole de la renaissance africaine Patrice Lumumba. C’était aussi le cas de la Centrafrique, où en janvier 1966, Jean Bédel Bokassa avait renversé David Dacko pour les beaux yeux de la France.
Il y’a par ailleurs des coups d’état qui ne sont que l’expression des ras-le-bol des militaires eux-même quand ils meurent aux fronts sans moyens véritables pour combattre pour des causes qui ne leur semblent pas justifiées comme c’était le cas chez nous en 1978, quand les militaires se sont débarrassés de Ould Daddah parce, que d’une part, ils n’étaient pas préparés à la guerre et parce que d’autre part, ils n’avaient ni les moyens logistiques ni les moyens humains de la mener.
Au cas de la Mauritanie peut être assimilé celui du Burkina Faso. Le 24 janvier 2022, les militaires burkinabés qui ne voulaient plus mourir aux fronts en permettant à leurs dirigeants de se remplir les poches en suivant la guerre dans des salons climatisés, avaient claqué la porte derrière le président Kaboré qui était peu soucieux des conditions dans lesquelles les militaires de son pays luttaient au front parfois sans armes, sans munitions et très souvent sans approvisionnement ni logistique.
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Quand la jalousie est à l’origine d’un coup d’état.
En Afrique, entre le 23 juillet 1952, date à laquelle le Mouvement des officiers libres conduit par Gamal Nasser avait destitué le roi Farouk Ier et le 24 janvier 2022 date du renversement du régime au Burkina Faso, il y’a eu des centaines de coups d’états.
Mais dans toutes les annales de l’histoire de ces coups d’états survenus en Afrique, deux cas restent atypiques. Celui du renversement de William Richard Tolbert du Libéria et celui du reversement de Sidi Ould Cheikh Abdallahi en Mauritanie.
Au Libéra une blague qui tourne à la catastrophe.
C’était un samedi. Le 12 avril 1980. Il faisait beau temps à Monrovia. Tout était calme dans ce pays anglophone dont la première constitution date de 1847. Un sergent-chef du nom de Samuel Doé (élevé à ce grade le 11 octobre 1979), est administrateur du troisième bataillon de la capitale. Il est ce jour-là de faction au Palais présidentiel.
Accompagné d’un autre militaire, un ami à lui appartenant au corps de la sécurité présidentielle, ils marchaient tous deux aux abords du palais présidentiel le long de la plage sablonneuse.
De l’endroit où les deux militaires se trouvaient, on pouvait apercevoir le président William Tolbert qui se tenait debout face à la mer, l’océan atlantique. C’est le président d’un pays riche en diamants d’où par le passé étaient embarqués pour le voyage de non-retour 1200 esclaves par mois.
C’est le début du Week-end. Le président Tolbert et sa femme semblaient joyeux et se prenaient par les bras debout sur le balcon de la résidence présidentielle de ce pays devenu colonie Commonwealth en 1838 et république indépendante en 1847 après une déclaration d’indépendance rédigée par Hilary Teague, un membre de l'American Colonization Society venu des États-Unis spécialement pour l’événement.
Le sergent-chef Samuel Doé regarde le couple présidentiel avec une certaine jalousie. Le couple présidentiel semblait heureux. Ils étaient riches et ne manquaient de rien. Lui, Samuel était pauvre et sa femme et lui vivaient dans une pièce et dans des conditions difficiles. Son regard était fixé sur le couple et des pensées se bousculaient dans sa tête. Le Sergent-chef était un commando formé par les bérets verts américains.
Soudain, comme réveillé en sursaut, il sort de ses pensées et dit à son ami. « Et si on prenait le pouvoir ? » « Comment ? » s’est interrogé l’autre. « Viens. Tu vas voir ». Samuel Doé remonte au palais, prend son fusil d’assaut et ouvre le feu à bout portant sur le président et son épouse.
Le coup d'État improvisé est d’une violence inouïe mais réussit. Dans les heures qui suivent le sergent-chef ordonne qu’une grande partie de la direction du True Whig Party, 13 fonctionnaires de l'administration de Tolbert et tous les membres du gouvernement soient exécutés en public attachés sur des poteaux plantés sur la plage à l’endroit même où il avait décidé de mettre son plan improvisé en exécution.
Il met en place un Conseil de rédemption du peuple, son « Mouvement de Rectification » à lui le « People's Redemption Council » , espèce « de l’UPR », forme un gouvernement provisoire qu'il préside et il s’élève au grade de général.
Le sergent-chef Samuel Kanyon Doe de son vrai nom, est né le 6 mai 1951, à Tuzon, un petit village situé en profondeur dans la région de Grand Gedeh. Il était enfant d’une famille très pauvre du groupe éthnique Krahn, une communauté autochtone minoritaire.
En 1990, dix ans après sa prise de pouvoir sanguinaire, le Liberia bascule dans la guerre civile. Prince Johnson du Front indépendant et Charles Taylor du NPLF sont à la tête de deux groupes rebelles et se dirigent sur Monrovia. Les rebelles sont perçus comme des libérateurs contre le régime de Samuel Doé qui s’imposait par la terreur et les crimes de masse perpétrés par ses troupes.
Le petit sergent-chef qui avait pris le pouvoir parce qu’il était incapable de donner deux repas par jour à sa femme et qui s’était imposé par sa dictature criminelle est capturé par les troupes de Prince Johnson dans le bureau du chef de l'ECOMOG, qui venait d’être déployée un mois seulement auparavant.
Il est exhibé au public ligoté sur une chaise en bois et tué d'une balle tirée dans la tête après des supplices et des tortures au cours desquels ses jambes avaient été mitraillées, ses oreilles et ses doigts coupés. Ensuite, son corps nu avait été exposé dans les rues de Monrovia jusqu’à sa décomposition avancée.
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Quand la publication d’un décret aveugle de colère un général...
Le 6 août 2008, Mohammed Ould Abdel Aziz, Général, commandant en chef du BASEP, (Bataillon de la Sécurité Présidentielle) renverse le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi élu démocratiquement. Motif de cette « catastrophe antidémocratique » la plus grave de toute l’histoire de la Mauritanie, le limogeage du général par le président pour raison d’entrave à l’action du gouvernement par des activités politiques subversives et l’encombrement des couloirs du palais présidentiel par son omniprésence.
Ce que le putschiste Ould Abdel Aziz avait appelé « mouvement de rectification » n’était en fait qu’un acte réfléchi commis pour son intérêt personnel, même s’il avait fait croire qu’il le faisait pour sauver l’institution militaire d’une décapitation.
Ce que l’histoire retiendra de cet événement (qui n’était pas un coup d’état militaire dans sa forme classique), c’est que c’était vraiment le coup d’état « de la supercherie ». Simplement parce que les plus puissants officiers de l’armée mauritanienne (les plus responsables et les plus crédibles), avaient été mis devant un fait accompli par un des leurs, véritable « aventurier », qui allait par la suite démontrer par des faits que ce qu’il avait appelé « mouvement de rectification » n’était pas plus et pas moins qu’un piège politiquement, économiquement et financièrement mortel dans lequel tout le pays avec ses institutions militaires, ses formations politiques, ses rouages administratifs et même ses partenaires allaient tomber les uns après les autres.
Sur le plan moral, sur le plan politique et sur le plan sécuritaire, ce qui s’était passé cette maudite journée du 6 août 2008, était pourtant inadmissible et inconcevable. Parce que simplement, c’était la conséquence de la saute d’humeur d’un général gravement atteint d’un syndrome de complexe d’infériorité.
Des informations ont révélé plus tard, que ce jour-là, Ould Aziz, fou furieux de n’avoir pas pu –même sous la menace- obliger feu Sidi Ould Cheikh Abdallahi à revenir sur la décision le limogeant (lui et deux autres officiers supérieurs entrainés malgré eux dans une mésaventure), il avait ordonné à des soldats de « sa » garde personnelle de ramener de force le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi au BASEP, donc dans son « repaire », pour l’intimider par des menaces.
Vrai ou faux. Ce qui est certain c’est que le président démocratiquement élu avait été contraint par la force de « répondre » à la convocation d’un officier supérieur qui n’était plus dans l’exercice de ses fonctions depuis les premières heures de la matinée de ce 6 août 2008.
Ce qui s’était passé ce jour-là, ressemblait à tous points de vue à l’épisode d’un film de la Mafia sicilienne. C’est pourquoi on retiendra toujours, pour l’histoire et pour la postérité, que les éléments de la garde rapprochée du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi de l’époque n’étaient que des gorilles en papiers.
Payés et bien payés pour défendre, même par le sang s’il le faut le président de la République, ces « gorilles de la honte » avaient brillé par leur indifférence face à une situation inédite, celle de l’enlèvement d’un président élu démocratiquement par des petits voyous en tenues à la solde d’un général limogé.
« Mouvement de Rectification », ce renversement de régime qui avait basculé la Mauritanie dans l’horreur antidémocratique avait en tous cas fait perdre à notre pays l’espoir de voir un pays réconciliée avec lui-même et hissé au haut du mat de la gestion moralisée de la chose publique.
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El ab’d, ma yihmid ni-émit’ rabou mahou ineine…..
Ould Abdel Aziz et Samuel Doé sont deux militaires venus au pouvoir à des époques différentes dans des pays différents pour des raisons différentes. Le premier, (Ould Abdel Aziz) avait commis un crime contre la démocratie de son pays pour son intérêt personnel et pour sauver son honneur. Il savait parfaitement bien que si le décret le limogeant avait été mis en application, il serait parti du statut d’un homme très puissant et très respecté vers celui d’un responsable qui allait errer dans l’arrière-cour du garage « administratif » où sont déversés les responsables desquels les régimes se débarrassent définitivement.
En agissant ainsi, Il avait donc fait le bon choix. Celui de prendre tout le monde de court et de s’imposer comme le « sauveur » de la grande muette d’une décapitation grave. Après dix ans de règne sans partage et sans consultation avec qui que ce soit, (militaire, civil ou politique sur les questions d’intérêt national), il est maintenant poursuivi pour crimes contre l’économie et les finances de son pays par une enquête judiciaire qu’il considère comme le prolongement d’un véritable complot politique ourdi contre sa personne.
Il vit « isolé » ou presque, neutralisé judiciairement et anéanti politiquement par une détention préventive sécuritaire extrême (d’ailleurs injustifiée), abandonné par ceux-là mêmes qui l’avaient accepté ce 6 août 2008 sans mesurer les conséquences de leurs actes.
L’autre, Samuel Doé, un petit délinquant des faubourgs de Monrovia avait pris le pouvoir en trahissant la confiance d’un chef d’état qui le prenait pour son propre fils. Quand il s’était bien calé dans le fauteuil trop grand pour sa petite taille de fumeur de joints, Samuel Doé avait commis des crimes abominables qui avaient dressés contre lui toute l’humanité. Mais, sa cruauté s’était faite justice elle-même. Et il en avait payé le prix de cette cruauté par la souffrance. Il a été torturé publiquement devant les caméras des télévisions du monde entier avant d’être exécuté et exposé aux curieux des bidonvilles, jeté sur le pavé d’une rue très fréquentée de la capitale à la merci des chiens errants.
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Les leçons de morale des coups d’états.
C’était peut-être pour éviter l’une ou l’autre de ces fins de chefs d’états renversés, que quelques jours après son renversement, Roch Marc Kaboré s’était empressé d’écrire une lettre adressée à Paul Henri Sandaogo Damiba, son tombeur, pour l’informer qu’il démissionnait de son poste de président de la République du Faso élu démocratiquement sans pression aucune.
Kaboré, le président voleur et pilleur qui mettait sous le lit de sa chambre à coucher l’argent que Macron l’impopulaire destinait au renforcement des capacités opérationnelles de l’armée du pays des hommes intègres pour lutter contre le terrorisme, -(poltron qu’il est)-, avait eu tellement peur pour sa peau, qu’il avait confondu dans l’adresse de sa lettre manuscrite, le comité militaire et le conseil constitutionnel de son pays.
Journaliste indépendant